Page 249 - Livre Beau-Rivage Palace
P. 249

Fig. 6

                  casino L-O., Musée d’art et d’histoire de Genève, casino d’Evian. » Le   soutenant les oculi, pots à feu – a aujourd’hui disparu. Des entrées
                  système rabitz consistait en un treillis métallique gainé de terre   latérales, placées à l’occident et à l’orient, présentent encore leurs
                  cuite pouvant être mis en forme et recevoir tout type d’enduit.  menuiseries d’origine et des  « consoles » sculptées en forme de
                      C’est au sculpteur Morhardt, de Berne, que revient le travail   cartouche Louis xiv.
                  de stucage. Établi à Clarens, puis à Lausanne et Genève, il se profile      À l’intérieur, il subsiste des stucs représentant des allégories de
                  comme le spécialiste du marbre artificiel. Au Beau-Rivage, l’artiste   l’architecture alternant avec des putti allumant des pots à feu (fig. 7
                  a réalisé une prouesse technique avec ses personnages haut perchés   et 8). Au plafond, les peintures d’Otto Haberer ont subi l’outrage
                  dominant la salle à manger. Il s’agit d’Amours aux ailes de libel-  des ans (des infiltrations d’eau notamment) et sont devenues diffi-
                  lule – entre le putto et l’elfe ! – et de jeunes femmes, allégories de la   cilement lisibles. À l’ouest, une cheminée en marbre rouge, réalisée
                  Nature. Ces figures se tiennent en équilibre sur la corniche d’en-  par Luigi Uberti, donnait une touche chaleureuse à l’ensemble, elle
                  tablement qui repose sur une série de colonnes, piliers et pilastres   a cédé depuis lors sa place à un office (fig. 9). Mais cette salle de-
                  en faux marbre et marbre artificiel. En dépit de leur position ap-  vrait être prochainement restaurée ; gageons qu’elle retrouvera une
                  paremment instable, elles incarnent la grâce et la légèreté, prenant   partie de son lustre d’antan.
                  appui sur les éléments d’architecture, comme la corniche, d’où dé-
                  passe parfois un pied ou le bas d’une robe, ou encore les médaillons    1. N°144, p. 8.
                  peints qu’elles tiennent de leurs mains. Dans cette pose acrobatique    2. Édition du lundi 22 juin 1908.
                                                                           3. ABR, PV, 19 juin 1908, p. 76. Dave LÜTHI, Eugène Jost (1865-1946), architecte [Mémoire de
                                                                             licence en histoire de l’art], Lausanne : UNIL-Faculté des lettres, 1999, p. 76.
                  et en surplomb, elles parviennent pourtant à croiser leur regard      4. « L’histoire de Zwahlen & Mayr. Du fer forgé aux grands ouvrages », texte conservé dans
                  d’un bout à l’autre de la salle et à se tendre qui une couronne de       les archives de la famille ; L’esprit d’entreprise [Ingénieurs et architectes vaudois],
                                                                              [Lausanne] : SIA section vaudoise, 1987, p. 106-107 ; INSA. Volume 11 – Index des noms
                  lauriers, qui un bouquet. Leurs longues robes, à l’antique, flottent       de personnes des volumes 1-10, Berne : SHAS, 2004, p. 319 ;
                                                                              « Article nécrologique », Patrie suisse, 1919, p. 165-166 ; Gazette de Lausanne n°152,
                  sous l’effet d’une brise. À leurs pieds, sont déposés des bouquets de       4 juin 1919, n°154, 6 juin 1919. EIPVD, volume 3 – Les artisans de la prospérité, Lausanne :
                                                                              Editions 24 Heures, 197, p. 173, 176-177 ; Sylvain MALFROY, La rénovation urbaine et les
                  fleurs et de fruits. Dans un environnement chargé et monumental,       problèmes de sauvegarde du patrimoine architectural [Mémoire de licence en histoire de
                  l’artiste a vraiment su insuffler à ces femmes équilibristes un mou-        l’art], Lausanne : UNIL-Faculté des lettres, 1979, annexes II, p. 28. COLLECTIF, Escaliers.
                                                                             Décors et architecture des cages d’escalier des immeubles d’habitation de Suisse romande
                                                                             1890-1915, Lausanne : PPUR, 2006, p. 43, 48, 57, 84, 189, 193, 199.
                  vement à la fois réaliste et aérien (fig. 6).              5. Catalogue officiel de l’Exposition cantonale vaudoise à Yverdon, 1894, Lausanne : A. Rochat,
                      En 1959, le directeur Walter Schnyder propose de transfor-      1894, p. 93.
                                                                           6. ABR, cote 144. Anne WYSSBROD, Beau-Rivage Palace, analyse historique et documentaire,
                  mer la salle Sandoz en entrée monumentale, pour permettre la       Lausanne : EPFL-ACM, 1992 [rapport non publié].
                                                                           7. Joëlle NEUENSCHWANDER FEIHL (dir.), Une Menuiserie Modèle, Les Held de Montreux,
                  construction de 28 chambres à l’étage de cette annexe et suppri-      Yens-sur-Morges : Cabédita, 1992.
                                                                           8. En 1908, il élit domicile dans une petite villa à l’allure pittoresque, « Clos d’Ouchy »
                  mer ainsi les deux anciens accès qu’il trouve malcommodes . Heu-      située juste derrière l’hôtel, construite sur les plans de l’architecte Louis Bezencenet
                                                                  9
                  reusement, son projet n’a pas été mis à exécution…            (ch. de Beau-Rivage 16). On y trouve des vitraux signés Chiara. Cette villa illustre très
                                                                             bien la manière que les entrepreneurs et artisans avaient de travailler ensemble, se
                                                                              suivant d’un chantier à l’autre.
                                                                           9. ABR, cote 147, lettre de Walter Schnyder au conseil d’administration.
                  LA ROTONDE                                                10. Dossier de mise à l’enquête 1976, AVL, cote 159, Agrandissement de la rotonde.
                      Les stucs de cette salle sont attribués à Negri & Uberti, ar-
                  tistes qui ont travaillé à plusieurs reprises avec l’architecte Eugène
                  Jost. Profondément modifié au cours du xx  siècle, le hall se pré-
                                                      e
                  sente comme une rotonde, dont n’émerge plus aujourd’hui que
                                                    10
                  la coupole, cernée par la véranda de 1976 . À l’extérieur, le riche
                  décor sculpté qui l’ornait – guirlandes, têtes de femmes, éphèbes

 Fig. 4  Fig. 5   Ouchy – Beau Rivage Palace, La salle à manger.          Fig. 7 > La rotonde vue vers le sud. Ce grand espace lumineux est doté d’un décor
 Eugène Jost architecte, Plafonds du hall et de la salle à manger,   Eugène Jost architecte, Beau-Rivage Palace (s. à manger),   Carte postale non datée.  tridimensionnel unique en son genre dans l’architecture hôtelière régionale.
 esquisse aquarellée, [vers 1906].  esquisse aquarellée, [vers 1906].     Au plafond, les peintures d’Otto Haberer.
                                                                          Fig. 8 >> La rotonde vue vers le nord en direction de la salle à manger.
                                                                          Fig. 9 >>> Dans la salle à manger.
                                                                          Photographies, vers 1920.
 248                                                                                                                         249
   244   245   246   247   248   249   250   251   252   253   254