Page 297 - Livre Beau-Rivage Palace
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Fig. 1           Fig. 2

 LES SANDOZ ET LE BEAU-RIVAGE PALACE,     D  Jacques Landolt, époux de Nicole Landolt-Sandoz, entre à son   artiste que l’on trouve à Ouchy face au débarcadère de la cgn, ou
                      L’année suivante, le gendre d’Édouard-Marcel Sandoz, le
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 PLUS D’UN SIÈCLE DE FIDÉLITÉ  tour au conseil. Il y représente désormais les intérêts de la Fonda-     Édouard-Marcel Sandoz, on le sait moins, collabora dès le
                  tion de Famille Sandoz créée par son beau-père. Jacques Landolt   début de sa carrière avec divers porcelainiers, dont Haviland en
                  cédera son siège à l’aîné de ses fils, le banquier Marc-Édouard   France et Langenthal en Suisse, et ce pratiquement jusqu’à la fin
                  Landolt en juin 1979. À dater de 2005, c’est le plus jeune frère   de sa vie. Les hôtes les plus privilégiés du Beau-Rivage se sou-
                  de celui-ci, François Landolt, qui assure désormais la présence   viendront sans doute avoir déjeuné dans une vaisselle décorée de
                  familiale au conseil.                                   poissons des mers chaudes, selon les motifs que l’artiste dessina lors
                      Ainsi depuis un siècle, l’engagement tant financier que dé-  de ses voyages à Monaco puis en mer Rouge au début des années
                  cisionnaire des membres de la famille Sandoz à l’égard du Beau-  trente. Cette vaisselle fut éditée à partir de 1958 par la manufacture
                  Rivage Palace ne s’est jamais démenti, assurant à l’hôtel les bases   de porcelaine de Langenthal, rééditée plusieurs fois depuis, et ré-
                  d’un développement solide et mesuré.                    gulièrement utilisée pour le service jusqu’en 2005 (fig. 4).
 Jacques-Michel PITTIER
                      D’abord minoritaire, l’actionnariat de la Fondation de Famille      Enfin, l’hôtel a également acquis au fil du temps plusieurs
    Lorsqu’Édouard-Constant Sandoz (1853-1928) s’installe avec   Sandoz s’intéresse de près à l’avenir économique de la Suisse ro-  Sandoz s’est régulièrement accru pour atteindre désormais une   peintures à motifs de fleurs ainsi que des objets en bronze Art déco
 sa famille sur les rives du Léman, c’est en homme accompli et en   mande. Il participe financièrement, dès le tournant du xx  siècle,   large majorité. La remarquable stabilité financière qui en découle   de la main de Sandoz qui ornent encore l’une ou l’autre des suites
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 entrepreneur comblé. Fondateur avec le chimiste Kern de l’entre-  au développement de plusieurs entreprises tant régionales que lo-  a permis au Beau-Rivage Palace non seulement de traverser sans   du Beau-Rivage.
 prise bâloise Sandoz SA, il a choisi de revenir à Lausanne où son   cales, dont la sio. Parallèlement, et en mécène discret, il dotera et   encombre ni compromis sur la qualité exceptionnelle de son ac-
 épouse Olympe (sœur d’un des fondateurs de l’entreprise horlo-  soutiendra nombre d’œuvres et d’institutions sociales lausannoises,   cueil, deux conflits mondiaux et nombre de crises économiques,  SAUVER OUCHY
 gère Longines et nièce du peintre Émile-François David) est née,  créant ainsi une tradition familiale que ses héritiers auront à cœur   mais de mener à bien les rénovations d’envergure nécessaires à      On ne saurait clore ce bref survol sans évoquer le fameux
 et où elle a gardé de profondes attaches. Lui-même y a suivi deux   d’honorer à leur tour.  son rayonnement.  épisode d’«Ouchy-la-Verte» , qui démontre l’attachement profond
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 semestres d’études à l’Université, fréquentant la Société de Belles-     de la famille Sandoz à l’égard de Lausanne. Le premier acte se joue
 Lettres entre 1870 et 1871.   UNE PRÉSENCE ACTIONNARIALE  UNE FIDÉLITÉ ARTISTIQUE  en 1926, lorsqu’Édouard-Constant Sandoz cède à la Ville toute la
    Ses  trois  fils,  Édouard-Marcel  (1881-1971, fig.  1),  Aurèle-     C’est en 1907 que le nom d’Édouard-Constant Sandoz appa-     L’engagement de la famille Sandoz à l’égard du Beau-Rivage   partie sud de la propriété du Denantou, afin d’y favoriser la créa-
 Gilbert (1884-1952) et Maurice-Yves (1892-1958) passeront donc   raît pour la première fois dans les registres des procès-verbaux de la   ne fut pas seulement financier, mais en ce qui concerne plus par-  tion d’un parc public, ce qui fut chose faite après son décès survenu
 une majeure partie de leur enfance et de leur adolescence au De-  sio. Il y figure tout d’abord à titre de membre de la commission des   ticulièrement le sculpteur Édouard-Marcel Sandoz, il fut aussi ar-  en 1928.
 nantou, propriété qu’Édouard-Constant Sandoz acquiert en 1896   constructions, puis la même année comme membre de la commis-  tistique. Plusieurs de ses œuvres (offertes par lui ou acquises par      Trente années s’écoulent, sans que le quai d’Ouchy, qui mène
 et fait transformer pour les besoins de sa famille (fig. 2). Si la vie   sion financière. Désormais, le nom des Sandoz, puis celui de leurs   l’hôtel) ornent en effet les abords du Beau-Rivage Palace, dont la   de l’est de la place du Port à la tour Haldimand, ne subisse d’amé-
 qu’on y mène est d’ordinaire assez simple, elle s’inscrit néanmoins   descendants, les Landolt, sera étroitement associé aux destinées du   statue – autrefois placée dans la rotonde et déplacée en face de l’en-  nagements majeurs. Ce n’est pas le cas à l’ouest, le long de l’ac-
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 dans le cercle de la bonne bourgeoisie. Olympe Sandoz, en maî-  Beau-Rivage (fig. 3).   trée nord en 1958 –, commémorant la paix italo-turque de 1912    tuelle avenue de Rhodanie, où le paysage connaît durant la même
 tresse de maison avisée, y organisera quelques réceptions mémorables,     Des représentants de la famille en superviseront les activités,   ainsi qu’une paire de lévriers de marbre blanc veiné qui, depuis   période une série de profondes mutations dont le comblement des
 comme l’assemblée de la Société suisse des officiers où quelque huit   d’abord en qualité de membres de diverses commissions, mais aussi   1934, accueillent le visiteur de part et d’autre des marches d’accès   rives du lac et la construction des Bains de Bellerive.
 cents couverts furent alignés sous les arbres en juillet 1901, ou encore   à la vice-présidence du conseil d’administration. Le fils d’Édouard-  du hall principal (fig. 5). Plusieurs bronzes de Sandoz, datant des      Le deuxième acte a lieu en 1957, lorsque les propriétaires
 la fête du Centenaire de la Société de Belles-Lettres, en juin 1906, à   Constant Sandoz, le banquier  Aurèle-Gilbert Sandoz, siégera   années cinquante, agrémentent aussi le parc côté lac : un groupe   d’un terrain et de trois hôtels (Angleterre, Lutetia et Florissant)
 l’occasion de laquelle Édouard-Constant reçut le ruban d’honneur.   au conseil dès août 1926 et prendra la vice-présidence en mars   d’ânes,  une  fontaine  aux  pigeons,  ainsi  que  diverses  jardinières    situés entre la place du Port et le chemin de Beau-Rivage décident
    En entrepreneur qu’il est, et qu’il est resté même si des raisons   1948, cédant sa place en février 1952 à son frère Édouard-Marcel,    figurant des paons. Ces éléments de décor, animaux grandeur na-  de valoriser leur parcelle. Divers projets voient le jour : on prévoit
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 de santé l’ont momentanément éloigné de ses affaires rhénanes,  sculpteur et peintre, qui lui-même y restera jusqu’en 1971 .   ture, font en quelque sorte écho aux trois fontaines du même   initialement la construction d’immeubles de sept niveaux bâtis en
 Édouard-Marcel Sandoz vers 1971.  Les trois fils d’Édouard-Constant Sandoz : Édouard,   Fig. 3 >
                  Maurice et Aurèle réunis au Denantou.                   Édouard-Marcel Sandoz, Nicole Landolt-Sandoz, Anna Passavant-Iselin
                  Photographie, vers 1952.                                et Adèle Passavant sur la terrasse du Beau-Rivage Palace.
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