Page 373 - Livre Beau-Rivage Palace
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SOUVENIRS






 UNE IMMENSE VOLIÈRE

 VERS 1930









 André MULLER












 « À cette époque, le moment le plus attendu de l’année était pour nous

 la soirée du personnel qui se situait entre Noël et Nouvel An. Dans la grande salle bien décorée,
 aujourd’hui salle Sandoz, les employés et leurs familles se retrouvaient dans leurs plus beaux atours :
 nous étions ainsi plus de deux cents personnes autour d’un sapin de Noël pour un repas amical

 et festif. Mon père remerciait le personnel pour le travail de l’année, distribuait à chacun
 des gratifications selon ses mérites, ainsi que des médailles d’ancienneté pour cinq à vingt ans
 de service à Beau-Rivage. Puis venait l’heure des productions. Régulièrement, l’inénarrable
 tapissier, Schoenfelder, nous faisait rire aux larmes : personnage rondouillard, habituellement
 taciturne, mais qui, costumé et maquillé, était un comédien chansonnier malicieux dont

 les sketches en hochdeutsch et dans un français très approximatif étaient hilarants. Suivait un concert
 de Zitter (instrument suisse alémanique) donné par le mécanicien, Gothard Klingler,
 puis venaient de nombreuses autres productions. La soirée se terminait vers 2:00 ou 3:00 du matin

 au son d’un bal animé par l’orchestre de l’hôtel […].


 Alors, les repas suivaient un rituel précis. A 19:00, un premier coup de gong résonnait
 dans les étages : chaque hôte, s’il ne se faisait pas servir en chambre, se changeait. Les messieurs
 revêtaient une dinner jacket, les dames, coiffées et souvent habillées par leurs propres servantes,

 apparaissaient en robe longue, élégante, surtout le jeudi en vue de la soirée dansante.













 > Contrat passé entre le Beau-Rivage et l’orchestre, 24 avril 1878.




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